La déforestation a provoqué un changement de sélection dans la coloration de populations d'insectes

Thèmes : évolution, diversité génétique, effets anthropiques sur la biodiversité, relations interspécifiques

Une étude récente publiée dans la revue Science met en lumière un exemple frappant d'évolution induite par l'homme chez les insectes, en l'occurence chez les perles (ou plécoptères) endémiques de Nouvelle-Zélande.

Les perles du genre Zelandoperla, notamment l'espèce Zelandoperla fenestrata, présentent un polymorphisme de couleur remarquable. 

Plécoptères mâles adultes de Zelandoperla fenestrata. Les écotypes entièrement ailés (en haut) sont présents dans les zones forestières de plaine et les écotypes à ailes réduites (en bas) sont présents aux zones situées au-dessus de la limite forestière alpine. L'étude qui nous intéresse traite des écotypes ailés.

Polymorphisme de coloration de Zelandoperla fenestrata. Source : https://www.anthropocenemagazine.org/2024/11/scientists-uncover-new-textbook-case-of-human-driven-evolution/

Dans les zones forestières naturelles, certaines populations de cette espèce présentent une coloration mélanique noire, mimant ainsi les couleurs d'avertissement d'une autre espèce toxique de perle, Austroperla cyrene. Cette stratégie de mimétisme batésien (dont l'exemple classique concerne le papillon monarque et le vice-roi) permet aux perles non toxiques de dissuader les oiseaux-prédateurs de les manger en imitant l'apparence d'espèces toxiques. 

Cependant, avec la déforestation massive en Nouvelle-Zélande, les populations de Austroperla cyrene ont diminué, réduisant ainsi la raison du mimétisme pour Zelandoperla fenestrata. En réponse à cette pression environnementale, les populations de Zelandoperla ont évolué, abandonnant progressivement la coloration mélanique au profit de teintes plus claires. La proportion de Zelandoperla à la coloration sombre passe ainsi de 40% dans les zones avec encore des forêts à un peu moins de 10% dans les zones déboisées depuis le plus longtemps.

Des analyses génomiques menées sur plus de 1 200 spécimens ont révélé une sélection répétée au niveau du locus ebony, responsable du polymorphisme de couleur chez ces insectes. Ces résultats démontrent comment des pressions environnementales anthropiques peuvent conduire à des changements évolutifs rapides dans des populations naturelles.

Les chercheurs ont trouvé une proportion très faible de Zelanoperla sombresdans les régions ayant subi une forte déforestation et où le nombre d'oiseau est faible ainsi que le nombre d'Austroperla, l'espèce pigmentée qu'imite les Zelanoperla sombres. La coloration sombre n'offre plus aucune avantage à Zelandoperla dans ce milieu, contrairement aux milieux restés boisés.


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