Un site exceptionnel de fossiles dans l'Hérault commence à livrer ses secrets

 Thème : Histoire de la Terre, Climat, Fossiles 

Cabrières, un village de l'Hérault, situés sur les contreforts sud de la Montagne Noire va peut-être devenir l'un des sites mondialement connus en paléontologie tout comme les fameux schistes de Burgess. Les fossiles découverts sur le site offrent une vision inédite de la biodiversité de l'Ordovicien inférieur (- 485 à - 477 millions d’années). Ce site a été découvert par deux paléontologues amateurs en 2018 et fait maintenant l'objet d'une publication dans Nature Ecology & Evolution

Contexte géologique du site. Source : https://www.nature.com/articles/s41559-024-02331-w

La  présence concomittante de fossiles de tissus durs (coquilles, carapaces) et de tissus mous représente le principal atout du site. Cela est due à des conditions de fossilisation particulièrement rapide d'après les détails des cristaux qui ont été observés par microscopie électronique à balayage et d'après une analyse en profondeur des fossiles par le synchrotron Soleil sur le plateau de Saclay. On peut ainsi avoir une vision d'ensemble d'une communauté d'espèces, ce qui est exceptionnel pour l'Ordovicien inférieur. 


Vision d'artiste de la faune du site. Au premier plan, une rangée d'Ampyx (trilobites) et divers organismes coquilliers, dont des brachiopodes et un hyolithe (organisme à coquille conique dont on ne sait pas si ce sont des Mollusques ou des Brachiopodes, coin inférieur gauche). Derrière les trilobites, un lobopodien (famille de Panarthropodes à laquelle appartient aussi le fameux Hallucigenia de la faune des schistes de Burgess), un Chélicerate, des cnidaires (bleus), des éponges (vertes), des algues fines ramifiées (rouges et vertes) et des tubes hémichordés (violets), ainsi que quelques mollusques. Des arthropodes avec des carapaces à deux valves sont également présents. Source : https://www.nature.com/articles/s41559-024-02331-w

Le site se singularise des autres sites de la même époque par une grande quantité d'éponges de grande taille et d'algues ramifiées (représentant 26% des fossiles observés). Certains écosystèmes polaires actuels ont également cette particularité. A l'époque le site de Cabrières se trouvait en marge du continent Gondwana, près du Pôle Sud. 

Vue de l'hémisphère sud à l'Ordovicien inférieur. Le pôle sud est au centre. Source du fond de carte : https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1342937X20302756

La planète traversait alors une époque particulièrement chaude entamée à la fin de l'ére précédente, le Cambrien. Les mers des zones tropicales et tempérées étaient particulièrement chaudes (jusqu'à 15°C au-dessus de nos températures actuelles !) et de nombreuses extinctions ont été enregistrées dans les sites de fossiles correspondant. Pas dans le cas de Cabrières, ce qui montre que les zones polaires ont sans doute fait office de refuge, évitant une extinction de masse plus généralisée.

En revanche, le site ne présente que très peu d'Echinodermes mais les auteurs l'expliquent par le fait que les Echinodermes colonisent facilement des milieux peu riches, en conditions oligotrophiques mais supportent mal la compétition avec d'autres taxa lorsque les conditions sont riches en biodiversité comme c'est clairement le cas à Cabrières.

Le site va continuer à être exploité et une nouvelle campagne de fouilles est prévue en avril.



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