Dix ans après : où en est la thérapie régénératrice par conversion des cellules gliales en neurones ?

 

Il y a 10 ans, je vous parlais dans cet article, de la possibilité découverte par les chercheurs de convertir des cellules gliales en neurones. Les cellules gliales sont bien plus nombreuses dans le cerveau que les neurones (sauf dans le cervelet), pourquoi ne pas s'en servir pour soigner des neurones "malades" ou remplacer des neurones morts au cours de maladies neurodégénératives ? L'idée est ici de faire de la thérapie cellulaire in situ et d'éviter de passer par l'étape in vitro. De plus, les cellules souches neurales possèdent naturellement certains caractères de cellules gliales (d'ailleurs les cellules de la glie radiaire des embryons sont les cellules souches neurales).

Les chercheurs avaient utilisé un vecteur lentiviral pour cibler les astrocytes et y introduire le gène Sox2. La conclusion des chercheurs était que les astrocytes s'étaient dédifférenciées et étaient devenus des précurseurs neuronaux (neuroblastes) qui s'étaient différenciés par la suite en neurones.

Depuis 10 ans de nouvelles stratégies ont été développées pour transformer des cellules gliales en neurones : expression du gène NeuroD1 ou inhibition de l'expression de PTBP1. Les nouveaux neurones générés ont amélioré l'état de souris modèles d'AVC, de maladies de Huntington et de Parkinson. Mais une découverte a chamboulé l'interprétation des résultats. Les vecteurs utilisés ciblent bien les cellules gliales mais il y a aussi une petite proportion de ces vecteurs qui infectent des neurones. Des méthodes de suivi de lignage plus précises ont établi que les nouveaux neurones provenaient... de neurones pré-existants ! On voit toute l'importance d'avoir des bons outils ciblés et d'avoir une analyse de lignage rigoureuse pour ce genre d'étude. Néanmoins, l'amélioration partiel de l'état des souris est réel, ce qui ouvre de nouvelles perspectives. On pourrait ralentir la progression des maladies neurodégénératives en donnant un petit coup de boost aux neurones encore présents !

Ces problèmes ne doivent pas occulter le fait que la conversion des cellules gliales en neurones est tout de même possible. Elle a correctement été démontrée dans la rétine où les cellules gliales de Müller sont capables de redonner des neurones chez la souris. Ces conversions se font très facilement et spontanément chez les poissons et aussi dans une moindre mesure chez les Amphibiens après une blessure de la rétine. Pour arriver au même résultat chez la souris, il faut introduire un gène proneural (ASCL1) et aussi manipuler le contrôle épigénétique (par la trichostatine A qui bloque les désacéylations des histones) (voir cet article).

Référence : voir Wang et Zhang, 2022

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