Des poulets rendus résistants à la grippe aviaire grâce à l'édition de leur génome

 Thèmes : biotechnologie, maladies infectieuses, agro-alimentaire

Des chercheurs anglais ont utilisé la technologie d'édition de gènes connue sous le nom de CRISPR/Cas9 pour créer des poules présentant une résistance à la grippe aviaire H5N1. Cette étude a été publiée cette semaine dans la revue Nature Communications.

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Au cours des dernières années, une version hautement mortelle du virus de la grippe aviaire connu sous le nom de H5N1 s'est propagée rapidement dans le monde entier, tuant d'innombrables oiseaux sauvages et des oiseaux d'élevage. Le virus a également infecté à plusieurs reprises des mammifères sauvages et a été détecté chez un petit nombre de personnes, mais il n'y a pas eu de transmission interhumaine étendue. Bien que cette souche virulente du virus reste essentiellement adaptée aux oiseaux, les scientifiques pensent qu'elle pourrait acquérir des mutations qui faciliteraient sa propagation entre les humains, déclenchant ainsi une pandémie. Il y a quelques années, les épidémiologistes craignaient beaucoup plus une pandémie venant de H5N1 qu'une pandémie à coronavirus type Covid.

Les chercheurs anglais ont modifié le gène ANP32A qui code une protéine dont le virus H5N1 a besoin pour se répliquer. La forme mutée de la protéine ne possède plus les acides aminés avec lesquels les protéines virales interagissent.

Structure génomique du gène ANP32A et mutations introduites par CRISPR/Cas9 (PGCs donor DNA). Deux changements de nucléotides (lettres rouges) dans la séquence codante d'ANP32A introduisent des mutations faux-sens de l'asparagine (N) en position 129 (N129I) et de l'acide aspartique (D) en position 130 (D130N), inhibant l'interaction de la protéine du poulet avec les protéines virales. Le troisième changement de nucléotide (lettres vertes) est une mutation synonyme qui sert de marqueur de contrôle pour la contribution allélique des hôtes mâles et femelles. Source : https://phys.org/news/2023-10-gene-edited-chickens-bird-flu.html


Les poulets "mutés" se sont avérés en bonne santé et ont pondu des oeufs normalement. Ils ont ensuite été exposés à des doses modérées de virus H9N2, qui est proche de H5N1 mais moins dangereux à manipuler en laboratoire. 90% des poulets mutés n'ont pas montré de signes d'infection et n'ont pas transmis le virus alors que plus de la moitié des poulets "sauvages" ont été infectés et ont transmis le virus. A des doses fortes de virus, même si les poulets "mutés" ont été moins affectés que les poulets "sauvages", des variants de virus ont été sélectionnés et l'avantage de la modification génétique a été perdu au fur et à mesure du temps. Ces résultats suggèrent que la création de poulets résistants à la grippe nécessitera la modification de plusieurs gènes. En effet, les virus sélectionnés sont parvenus soit à utiliser tout de même la version mutée d'ANP32A, soit à faire répliquer leur génome par ANP32B et ANP32E, des protéines proches d'ANP32A. Ces deux protéines sont des cibles évidentes pour une édition génomique plus large.

Pour les auteurs, il s'agit surtout d'une "preuve de concept" que l'approche par l'édition du génome peut marcher (au moins temporairement) et que leur travail n'est qu'une étape pour aboutir à une solution plus efficace à long terme. L'enjeu est de taille, car le virus de la grippe est connu pour évoluer assez rapidement.

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