La fragmentation des particules organiques limite l'absorption du CO2 par les océans

Thèmes : cycle du carbone, océan, réseaux trophiques, climat


L'absorption du carbone par les océans est un paramètre très important pour le futur de notre planète. 30% du carbone émis dans l'atmosphère par les activités humaines y sont absorbées, permettant de mitiger les effets sur le climat, mais au prix d'une acidification des eaux qui pose également problème. 

L'absorption est réalisée par deux mécanismes : la "pompe physico-chimique" et la "pompe biologique".


Source : https://fr.oceancampus.eu/cours/rlF/ocean-puits-de-carbone
La "pompe physico-chimique" correspond à l'absorption du CO2 essentiellement par les eaux froides qui vont l'emmener en profondeur par le jeu des courants. Signalons au passage que le réchauffement des eaux de surface dû au réchauffement climatique diminue la solubilité du CO2 et que cette pompe devrait moins bien fonctionner à l'avenir...

La "pompe biologique" qui nous intéresse ici, correspond à la photosynthèse des organismes planctoniques à la surface des océans (zone euphotique). Cette pompe est nettement moins efficace que la première car à la fin, seuls 2 à 4% du carbone capturé finira séquestré au fond des océans sous forme de sédiments. Une étude parue dans Science en Février 2020 et menée par une équipe franco-britannique, explique quelle est la raison de ce faible rendement.

50 Gigatonnes de CO2 atmosphérique/an sont absorbées par le phytoplancton et transformées en matière organique. Celle-ci circule dans les réseaux trophiques, et par la respiration, du CO2 est relâché. Cependant, l'équivalent de 10 Gigatonnes de CO2 "chute" dans les profondeurs sous forme de phytoplancton mort ou de pelotes fécales produites par le zooplancton ou les poissons. Ces 10 Gigatonnes rejoignent la zone mésopélagique (entre 100 et 1000 mètres de profondeur) mais plus profondément on ne retrouve que l'équivalent de 2 Gigatonnes. Quelle est la cause de cette déperdition qui fait que peu de carbone finit par être séquestré dans les sédiments ?

Les chercheurs ont utilisé des robots pouvant faire des mesures jusqu'à 1000 mètres de profondeur. Ils ont observé que les pelotes fécales et le phytoplancton mort formaient des agrégats de plusieurs millimètres de diamètre à l'entrée de la zone mésopélagique. Cette taille de fragment les rend assez peu "attaquables" par les bactéries et le zooplancton détritivore vivant à ces profondeurs. Mais durant leur chute à travers la zone mésopélagique, les agrégats se fragmentent et deviennent plus petits. Cette fragmentation permet aux bactéries et au zooplancton détritivore de les manger plus facilement car plus de surface se trouve exposée. Il y a ensuite à nouveau un dégagement de CO2 par la respiration. Seul le reste des agrégats qui échappe à cette activité détritivore s'enfonce encore plus profondément et rejoint les sédiments où le carbone sera séquestré pour de bon.

Les chercheurs prévoient d'envoyer de nouveaux robots pour comprendre les paramètres qui contrôlent la fragmentation des agrégats dans la zone mésopélagique. Cependant, il parait difficile d'essayer d'influencer par géo-ingénierie ces paramètres à l'avenir pour augmenter l'absorption du CO2 par les océans.



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