Des inhibiteurs de la méthylation de l'ADN efficaces contre le paludisme

Thèmes : ADN, expression génétique, parasitisme

Le paludisme touche plus de 200 millions de personnes et cause 435 000 décès chaque année dans le monde et les résistances aux traitements ne cessent d'augmenter. Le parasite qui cause cette maladie est l'unicellulaire Plasmodium falciparum qui a un cycle complexe à deux hôtes : un moustique (l'anophèle) où il se développe dans la paroi intestinale puis les glandes salivaires et l'Homme où il colonise d'abord les cellules du foie puis les globules rouges. Ces changements de milieu nécessitent une plasticité phénotypique qui s'accompagne de modifications importantes du transcriptome contrôlées notamment par des modifications de méthylations des histones ou de l'ADN.
Deux équipes de l'Institut Pasteur se sont associées pour trouver des inhibiteurs de méthyltransférases de l'ADN qui pourraient perturber ces modifications et agir comme agent anti-paludéen. Elles viennent de publier leurs découvertes dans un article.

Les chercheurs ont travaillé avec des souches de Plasmodium résistantes à l'artémisinine, extrait d'une plante de la pharmacopée chinoise (maintenant synthétisé in vitro) et qui avait suscité beaucoup d'espoir comme agent de substitution de la chloroquine (pour laquelle les résistances devenaient problématiques) avant de voir émerger des résistances contre elle depuis 2008. Les Plasmodium ont été mis en présence de globules rouges humains afin qu'ils puissent les infecter et s'y installer. Plus de 70 molécules inhibitrices de la méthylation de l'ADN ont été testées pour voir si elles inhibaient le cycle de réplication du parasite. Certaines molécules se sont avérées très efficaces et ont tué le parasite en 6 heures.

Des essais sont ensuite réalisés chez des souris infectées par leur Plasmodium spécifique, P. berghei. Les parasites sont tués par les inhibiteurs de méthylation de l'ADN les plus efficaces et les souris ont des taux de mortalité nettement plus faibles que traitées avec un placebo.
Les molécules testées bloquent l'activité des protéines DNMT impliquées dans la méthylation de l'ADN.
 Source : https://pubs.acs.org/doi/10.1021/acscentsci.9b00874


Les étapes sont encore longues avant de voir appliquer ces traitements à l'Homme. Il s'agit notamment d'optimiser l'action sur les ADN méthyltransférases de Plasmodium tout en ayant une activité la plus faible possible sur les ADN méthyltransférases humaines : il ne s'agit pas de trop modifier le transcriptome du patient ! 
Mais malgré tout, il s'agit d'une toute nouvelle classe d'agents anti-paludéens prometteurs.

Voir communiqué de presse de l'Institut Pasteur



Commentaires