Des acides aminés d'origine abiotique dans la lithosphère océanique : un remake de l'origine de la vie ?

Thèmes : Histoire de la vie, lithosphère océanique, métamorphisme

Deux principales hypothèses sont débattues concernant l'origine de la vie sur Terre. La première considère les apports extraterrestres, via les météorites ou les astéroïdes, comme une source de molécules organiques nécessaire à l’ensemencement de la Terre. Dans le cadre de la seconde hypothèse, on estime que notre planète a eu le potentiel pour réaliser une chimie prébiotique suffisamment efficace pour engendrer les premières briques du vivant. C'est le concept de la "soupe primitive" popularisée par l'expérience de Miller-Urey dans les années 1950. Mais le modèle d'atmosphère primitive utilisé dans la cadre de cette expérience est désormais obsolète.
Dans une étude publiée dans la revue Nature, des chercheurs de l’Institut de Physique du Globe de Paris, de l’Université Paris Diderot, du CNRS et du synchrotron SOLEIL apportent un argument de premier ordre à l'hypothèse d'une origine de la vie sans apports extraterrestres, et notamment à la théorie hydrothermale de l’origine de la vie, repoussant même sa possible émergence en profondeur.
Les chercheurs ont utilisé des échantillons prélevés par forage, à 175 mètres de profondeur sous les fonds marins, dans la lithosphère océanique, près de la dorsale médio-atlantique. Après analyse, ils ont découvert des acides aminés aromatiques dont le tryptophane.

Caractérisation des acides aminés aromatiques trouvés dans la lithosphère océanique. Source : Menez et al., 2018 : https://doi.org/10.1038/s41586-018-0684-z


Ils se trouvaient dans des argiles riches en fer issues de l'altération de serpentinites sous l'influence de l'eau de mer qui y circule à une température entre 50 et 150°C (à cause de la pression l'eau ne se transforme pas en vapeur). 

Serpentinite : c'est au cours de l'altération de cette roche par des l'eau de mer chaude près d'une dorsale que les acides aminés aromatiques ont été produits.

Aucune trace de bactéries, ni de quoi que ce soit de vivant n'a été découvert dans ces prélèvements. Les réactions abiotiques impliquées reposent sur la production de dihydrogène H2 qui résulte de la réduction de l'eau couplé à l'oxydation du fer de l'olivine et du pyroxène. La structure en feuillets des argiles a favorisé la réaction. Ce travail apporte une nouvelle source possible de molécules organiques qui aurait pu être à l'oeuvre il y a 4 milliards d'années lorsque les premières "briques" du vivant étaient mis en place sur notre planète. 

Voir communiqué du CNRS


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